Par Houari Saaïdia*
Tension sur le carburant dans la région ouest du pays depuis ce début de semaine. Et, comme très souvent d’ailleurs, ce n’est pas du tout évident de pouvoir remonter à l’origine de ce phénomène épisodique auquel les automobilistes se sont habitués non sans grand mal.
Les scènes qui défilent devant les pompes à essence, un peu partout dans l’Oranie, rappellent inévitablement la très désagréable pénurie de janvier-février 2012. Bien que l’on ne puisse pas parler – pour l’heure – de pénurie générale du carburant, il n’en demeure pas moins que la situation qui prévaut dans les stations-service, depuis trois jours et dans presque toutes les wilayas de l’Ouest, n’est pas «normale» et n’augure pas d’un rétablissement rapide. Stations et relais pris d’assaut par de longues files enchevêtrées, pompes aux pistolets décrochés – signe de rupture de stock – tôt le matin, réservoirs à sec depuis plusieurs jours pour certains points de vente autant de signes évidents d’au moins une perturbation dans la distribution de ce produit vital pour les «êtres» mécaniques. Tous les types de carburant, l’essence «normal», le «super», le «sans plomb», ainsi que le gasoil, sont concernés par cette perturbation, que tout le monde espère être conjoncturelle et passagère.
Selon plusieurs gérants de stations à Oran, la livraison du «super» a connu un arrêt de presque une journée et ne s’est faite que dans la nuit du jeudi au vendredi. «Il n’en fallait pas plus pour créer la psychose chez les consommateurs», explique un concessionnaire d’une station agréé par Naftal. Cependant, si ce retard de 24 heures dans l’arrivage du seul type d’essence super peut expliquer l’affluence extraordinaire sur les pompes le lendemain (vendredi) et même à un degré moindre le surlendemain (samedi), cette version devient en revanche franchement insoutenable quand on voit la tension persister jusqu’à hier dimanche, sans s’atténuer d’un iota, touchant toute la gamme du produit.
En effet, hier matin, la quasi-totalité des stations-service d’Oran affichait carburants indisponibles, tous types confondus pour certaines et seulement le «super» et le «sans plomb» pour d’autres, alors que les rares points de distribution où tous les produits existaient à l’instar de celui d’El-Bahia étaient littéralement envahis par les véhicules de différentes wilayas. Là, dans cette station plutôt «régionale» puisque toutes les wilayas de l’Ouest s’y approvisionnent indirectement, les nombreuses files d’attente, qui débordaient jusque sur les quatre routes de ce carrefour giratoire causant d’énormes problèmes de circulation, avançaient au compte-gouttes puisque tous les clients faisaient le plein et certains remplissaient en plus des jerricans «de secours» qu’ils mettaient dans le coffre ou dans un coin de la remorque.
Les professionnels évoquent un autre fait qui paraît plausible a priori- qui a une part de responsabilité dans les perturbations que connaît le circuit de la distribution du carburant, à savoir un gros manque dans la flotte des camions-citernes qui livrent le produit aux points de vente, accentué par la grève observée dernièrement par plus de 150 propriétaires de camions-citernes assurant le transport du carburant dans le Sud-Ouest, conventionnés avec l’Agefal, filiale de la Société nationale de Transport routier (SNTR), en protestation contre le non-paiement de leurs prestations de service durant six mois. Selon les professionnels du créneau, ce débrayage a eu, en effet, des contrecoups dans les wilayas du Nord-Ouest, tellement les maillons du circuit sont «corrélés», voire interdépendants. Ce qui est sûr, en tout cas, c’est que le parc roulant disponible (celui de Naftal et des sous-traitants privés) est fort disproportionné avec la demande à l’échelle de la région ouest. C’est le constat fait par plus d’un. En d’autres termes, explique-t-on, il va falloir tripler la flotte existante pour garantir un service normal d’acheminement du carburant aux douze wilayas de l’Ouest, à partir du dépôt de Petit Lac, à Oran. Ce déficit dans les moyens de transport étant, la situation s’est compliquée davantage avec l’affectation d’une partie de la flotte pour acheminer du carburant au dépôt de Petit Lac à partir de la wilaya d’Alger, desservie par la raffinerie de Skikda par pipe. Ce mode de transport par route ne concerne toutefois pas le sans-plomb, lequel est transporté de Skikda à Oran ou en transitant par le dépôt d’Alger au moyen de bateaux. C’est ce qui explique, d’ailleurs, ajoutent nos interlocuteurs, la raison pour laquelle le sans-plomb n’a pas été concerné par la pénurie à proprement parler survenue en début d’année, mais que l’indisponibilité ponctuelle et partielle de cette essence était plutôt un effet collatéral, en ce sens qu’on se rabattait sur le sans-plomb faute de super. D’autres sources «officieuses» parlent d’un rationnement des quotas opéré par Naftal, qui a eu pour effet une sorte de tarissement de la source Aïn Témouchent, ce qui a eu pour conséquence, à son tour, un rabattement massif sur Sidi Bel-Abbès autoroute Est-Ouest aidant, laquelle wilaya a «répliqué» à cette sur-demande en allant puiser dans la source Oran.